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Décroissance heureuse ?

J'ai découvert Port-Saint-Louis-du-Rhône en croyant faire un roadtrip dans les bras du delta (c'était le titre du workshop auquel je m'étais inscrite). Je croyais me promener en Camargue et j’avais bien l’intention de tacler le mythe camarguais, né en France dans les années 50. C’est tout autre chose que j’ai découvert :

 

« Le long du canal des pontons rouillent, des voies ferrées ne mènent plus nulle part, des cathédrales de béton et des carcasses métalliques attendent la déconstruction et la décontamination dans les terrains vagues laissés aux herbes folles. La forêt de mats des ports à sec gagne du terrain sur les anciennes zones industrielles. Déjà trois ports à sec et bientôt quatre, pour satisfaire tous les propriétaires de voiliers en mal d'anneaux. Et puis les pêcheurs et leur plus modeste taillis de cannes ; cinq, six ou plus chacun, avec des alarmes électriques pour ne pas rater la touche de la daurade qu'on appâte au ver, au crabe ou à la moule. Sans oublier les camping-car qui ont leur parc de cent places au bord du canal ». extrait de « Décroissance heureuse ? »

 

Comment ne pas se laisser aller à une mélancolie toute houellebecquienne, où la désindustrialisation condamnerait les territoires à devenir des enclaves touristiques, doucement moribondes la plus grande partie de l'année, des décors pour artistes en mal d'inspiration ?

Tout ce que je ne voulais pas.

 

Je sortais de la lecture de « Detroit, dit-elle » de Marianne Rubinstein, où l'auteur, professeur d'économie, en rémission d'un cancer du sein, cherche dans les ruines du temple de l'industrie automobile mondiale, les signes d'une renaissance pour mieux croire à sa propre renaissance ; il me fallait, moi aussi, trouver des signes de renaissance, connaître l'histoire de cette ville et trouver des indices d’un espoir possible.

J'ai enquété sur les anciennes industries à partir de leurs enseignes effacées et des plans de la ville pour comprendre, et je suis allée à la rencontre des habitants : employé municipal, CDD à l'office du tourisme, historien de la ville, commerçant, pêcheurs, retraités de la SNCF ayant choisi la ville pour y vivre...pour qu’ils me racontent Port-Saint-Louis-du-Rhône.

 

J'en ai fait un livret qui retrace cette exploration de Port-Saint-Louis-du-Rhône et une exposition dans la galerie des participants des workshops des rencontres d’Arles. Je les ai intitulées « Décroissance heureuse ? » en gardant le point d’interrogation, car je j’aimerais poursuivre ce travail dans le cadre d’une « résidence » sur place.

exposition : http://www.gallery-arlesworkshops.com/portfolio/daniele-godard-livet-de-croissance/

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