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Photo du rédacteurDanièle Godard-Livet

Lissieu et son cimetière communal : 40 ans de résistance à la loi


texte reproduit intégralement dans lepost
délibération du conseil municipal de Lissieu en date du 6 juin 1876 en réponse à une plainte du sieur Planche

Napoléon qui s’occupait de tout quand il ne guerroyait pas s’occupe aussi des cimetières qui doivent désormais être hors des villes (décret du 23 prairial an XII (12 juin 1804)). Ce n’est qu’en 1843 que cela s’applique aux villages (Ordonnance royale du 6 décembre 1843)


Lissieu fait la sourde oreille et persistera pendant 40 ans.

Toutefois en 1853 la famille Charrin fait don à la commune d’une parcelle de terrain achetée à Jean Damour pour agrandir le cimetière près de l’église et entend bien qu’il en soit fait une concession perpétuelle pour la famille (et pour 25 ans pour Jean Damour). La proposition est assortie d’un plan et d’un devis pour la clôture (620 F).

La commune accepte le don avec reconnaissance, hésite un peu plus sur le devis qu’elle trouve conséquent, mais décide d’y pourvoir sur les fonds de la commune et la recette qu’elle vient d’obtenir en vendant à M. Brisson un morceau de chemin vicinal devenu inutile avec la construction récente de la Nationale 6. Léon Fleurdelix, beau-frère de feu de Charrin est alors maire et cela joue peut-être dans la décision.


En 1854, refusant toujours le transfert du cimetière, la commune adopte cependant ne tarification pour les concessions qui doivent se répartir en trois classes selon l’ordonnance de 1843 : perpétuelle (100F le m2), trentenaire ou temporaire. Elle revient ensuite sur ces tarifs considérés comme trop élevés pour les moyens des Lissilois, puis décide de nouveau de ne pas appliquer cette baisse. Les Lissilois inquiets ont commencé (en dehors de tout décès) à poser des pierres tombales et des croix sans acquitter aucun prix de concession. Le conseil municipal décide de faire enlever croix et pierres.


En 1869, nouvelle délibération pour relever le prix des concessions, mais toujours aucune décision pour transférer le cimetière.

En 1873, le préfet intime à la commune de se mettre en conformité avec la loi et de transférer le cimetière sous trois mois. La commune demande le statu quo sur son cimetière.

Gabriel Perrin, propriétaire de la Roue, maire de 1870 à 1875 achète une concession perpétuelle qu’il n’occupera jamais. Il sera enterré en 1913 au cimetière de Loyasse.

En 1876, M. Planche1 se plaint des odeurs méphitiques qui s’exhaleraient du cimetière. Il est explicitement considéré comme un fauteur de trouble qui porte ces allégations dans son intérêt personnel.

Cimetière communal
M. le maire met sous les yeux du conseil municipal une réclamation du sieur Planche qui vise à faire changer le cimetière communal prétextant qu’il s’en exhale pendant les grandes chaleurs des odeurs malsaines préjudiciables aux propriétaires qui l’avoisinent.
Le conseil municipal,
Vu la réclamation du sieur Planche,
Vu la lettre de M. le préfet en date du 27 mars dernier par laquelle il invite le conseil municipal à étudier la question,
Considérant que le cimetière existe de temps immémorial ;
Qu’il a été agrandi depuis quelques années et suffit largement aux besoins de la commune ;
Qu’on n’inhume plus depuis longtemps dans sa partie la plus rapprochée des habitations
Que le champ de sépulture on l’on inhume actuellement se trouve au nord et endehors des habitations ;
Que les voisins du sieur Planche ne se sont jamais aperçus d’aucune exhalaison désagréable ;
Que le sieur Planche lui-même n’a pas craint d’acquérir pour son compte l’année dernière la plus rapprochée du cimetière n’ayant par conséquent aucun scrupule au sujet des odeurs qu’il dit à tort provenir du cimetière ;
Attendu que le sieur Planche par sa réclamationn’a agit que dans un but d’intérêt personnel et dans l’espoir de voir se transformer en place publique l’ancien cimetière, à cette seule fin de pouvoir faire pratiquer des ouvertures dans son immeuble récemment acquis sur sa partie donnant du côté du cimetière et d’augmenter ainsi les facilités et la valeur dudit immeuble ;
Attendu qu’un projet important de rectification du chemin allant à Bois Dieu a été adopté et non mis à exécution et que cette exécution absorbe et au-delà toutes les ressources de la commune ;
Attendu que le changement réclamé par le sieur Planche est profondément antipathique à tous les habitants de la commune de Lissieu ;
Par tous ces motifs,
Demande avec instance à M. le Préfet la prorogation du statu quo attendu qu’il n’y a pas de motif sérieux pour donner suite à la plainte dont il est question.
Fait à Lissieu, en séance, le six juin mille huit cent soixante-seize, et ont signé au registre les membres présents après lecture.


En 1883, le sujet est de nouveau évoqué ; le conseil municipal propose un agrandissement vers l’est qui lui est refusé. C’est alors seulement, quarante ans après l’ordonnance de 1843, qu’une commission est nommée pour rechercher un nouveau terrain, faire établir plan et devis. Une imposition extraordinaire est votée. On ne devra envisager ni croix centrale ni barrière pour limiter les frais.


En 1884, l’immeuble de M. Latour aux Favières est acheté ; on en profite pour y placer aussi un jardin pour l’instituteur qui n’en a pas. Le plan intérieur du cimetière et les frais pour plantation d’arbres sont votés. Il contiendra 88 concessions perpétuelles, 18 trentenaires et 18 temporaires. On paiera avec les 5 concessions perpétuelles déjà achetées par des Lissilois.


Il semble que peu de familles aient demandé le transfert de leurs morts de l’ancien au nouveau cimetière, les frais en auraient incombé à la municipalité et aucune délibération du conseil municipal n’évoque le sujet.Je n’ai trouvé que trois sépulturesmentionnant des morts d’avant 1884 : celle de la famille Saignant , celles des familles Chaine et Chavanis


Restent à l’ancien cimetière des tombes très anciennes dans l’église dont les inscriptions sont pour la plupart illisibles (sauf Privat 1704, dans l’allée centrale, sans doute un charpentier), 7 pierres tombales sur le parvis presque effacées sauf trois :Jean Claude Duchamp ? Morel médecin 1821 (mort à Montvallon chez sa sœur), François Tourret 1841 (propriétaire de Montvallon, maire de Lissieu de 1830 à 1838) et des tombes autour de l’église :

- Stéphane Guyot de Lissieu 1826 (propriétaire de la Roue, maire de lissieu de 1826 à 1827) et sa sœur 1833 (épouse de Théodore Durozier, propriétaire de la roue et maire de Lissieu de 1827 à 1830)

- Comte Arsène O’Mahony 1847 (propriétaire de Montvallon) et sa seconde épouse 1846

- Comte De Charrin 1853 (propriétaire de la Roue, maire de Lissieu de 1840 à 1853), son épouse 1861 et Léon Fleurdelix 1859 (propriétaire de Bois Dieu, maire de Lissieu de 1838 à 1840 et de 1853 à 1859)2.


Et enfin accolée au mur nord la sépulture de Jean claude Duchamp 1836 et son épouse Marguerite Nachury 1855, Jean Claude Duchamp 1875 et son épouse Françoise Pommeruel 1854, le petit Jean Marie Briard mort à 4 ans en 1869 et sœur St Thomas née Jeanne Charles 1883 (institutrice communale, religieuse de la communauté des sœurs de St Joseph). Philibert Briard était alors maire et il s'agissait des tombes des parents, grands-parents de son épouse Jeanne Duchamp et de celle de leur fils Jean Marie.


ancien cimetière de Lissieu, son agrandissement de 1853 et emplacement des tombes restantes

Lors de la construction des logements sociaux, des tamaris, des bouleaux et des acacias, il semble avoir été envisagé de détruire la clôture de l’ancien cimetière et de créer une rue à travers cet espace jouxtant l’église. Trois passages piétonniers ont remplacé ce projet. C’est sans doute à cette époque que la clôture entourant le don de la famille de Charrin qui avait coûté 620 F à la commune a été supprimée.

1Antoine Planche n’était-il pas le quadrisaïeul d’Yvonne Vincent décédée en 2019. Décédé en 1884, Antoine Planche aura au moins eu le bonheur de reposer dans le nouveau cimetière.

2Antoinette Marie Charlotte Vincent de Vaugelas, veuve de Léon Fleurdlixet propriétaire de Bois Dieu jusqu'à sa mort sera inhumée en 1895 au cimetière de Loyasse.

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