Meriol Lehmann est un artiste canadien qui se présente comme artiste documentant le rural, c'est ce qui me plaît chez lui.
Cette année, il a entrepris de faire les foins sur un petit bout de friche (15 ares) : couper à la faux, andainer au râteau, retourner les andains à la fourche, entasser le foin sec sur une structure en bois qu'il a construite pour en faire une meule.
Avec la mécanisation, tout ou presque a disparu de cette pratique agricole; on coupe à la machine, on retourne à la machine, on emballe à la machine. Restent encore les andains séchant au soleil qui ont pour moi la même poésie que le linge séchant sur un fil .
Voir disparaître les foins, c'est comme voir disparaître le charme du linge qui sèche au soleil et au vent. Et ces odeurs si particulières dont nous ne nous souviendrons plus.
Concours de récoltes de foin sauvage comme en Suisse, performance artistique comme celle de Mériol... ne les remplaceront pas.
C'est sans doute pour ça que chaque année, je fais des photos des foins à Lissieu et ailleurs... pour ne pas perdre non plus mes souvenirs d'enfance... du temps où les foins étaient de tous les travaux agricoles ceux que pouvaient partager les citadins en vacances, n'exigeant aucune compétence particulière pour le maniement du râteau et de la fourche (pour la faux, c'était autre chose !)
Aujourd'hui, sauf obligation particulière pour la confection du fromage, on ne fait presque plus les foins que sur de mauvaises parcelles pour les empècher de s'embroussailler et pour le pondoir de mes poules j'achète un ballot sous plastique chez Gamvert.
Mon frère partant en voyage à travers la Suisse, l'Allemagne, la Norvège, la Suède et la Finlande, je lui ai demandé de me rapporter toutes les photos de foins qu'il trouverait. En 2023, la récolte est maigre : quelques foins séchant sur des fils au bord d'un lac de Norvège ! Peut-être juste pour les touristes !
Des outils, des gestes, des mots aussi qui se perdent : les barillons qu'on descendait par les cables à foin en Maurienne accrochés aux roulettes, les clés à foin qui servaient à serrer les barillons, les tristes des dolomites, les perroquets à foin.
Pour savoir à quel point la technique et les mots sont en train de se perdre, il suffit de regarder quelques vidéo sur Youtube "faire son foin à l'ancienne"
Mais on ne va pas en faire un foin ! C'était acrobatique et dangereux ! Et tellement incertain, si le beau temps ensoleillé n'était pas au rendez-vous.
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